Cela fait des années que le club Mickey de l’Ile-Tudy n’est plus. Les bateaux de l’école de voile ont aujourd’hui définitivement remplacé toboggan, balançoires à bascule, trampoline et piscine. Que de générations ont été marquées par ce club de plage ! Et que de souvenirs il laisse dans la mémoire de ceux qui furent acteurs ou spectateurs de son animation quotidienne. Qu’ils s’appellent René, Yves, Jacques ou Gilles, les propriétaires du Club Mickey ont leur part dans l’histoire de l’Ile-Tudy et pour certains dans celle de l’Hôtel Les Dunes. Cet article est un clin d’œil à toutes les générations du club de la presqu’île. A travers mes souvenirs et quelques entretiens, il témoigne de cette joyeuse agitation qui rendait la dune vivante, et de ces années qui mêlaient insouciance et liberté.
Les débuts du club Mickey de l’Ile-Tudy dans les années 50
Le manège de gym de René Stervinou
Françoise, quimpéroise et dont les parents avaient une maison à l’Ile-Tudy, se souvient de ce premier « manège de gym » qui avait obtenu l’adhésion rapide des vacanciers. « A l’époque, les touristes c’étaient les gens qui venaient de Quimper » me dit-elle en riant.
C’est René Stervinou, alors Professeur d’Education Physique et Sportive (EPS) au collège Paul Bert, à Quimper, qui fut l’initiateur du Club Mickey de l’Ile-Tudy.
« Sa femme Germaine, s’occupait de la location des pédalos et des périssoires » se remémore Françoise. « Quand c’était l’heure de rendre le matériel, elle jouait du sifflet sur la plage pour rappeler à l’ordre les clients qui ne respectaient pas l’horaire. Ça nous faisait beaucoup rire ».
Les débuts du volley-ball à l’Ile-Tudy
« Le matin il y avait de la gym pour adulte. Le point de rendez-vous était à Pen An Truck, on faisait la course en petites foulées jusqu’au Téven » se rappellent Marie-Paule et Pierrick dont les familles étaient des habitués de la plage. Le club, ils en gardent la trace indélébile de leur rencontre lors de matchs de volley-ball. René Stervinou introduit en effet ce sport collectif à l’Ile-Tudy. Le succès sera immédiat et grandissant au fil des années, dépassant la structure du club. Il laisse des souvenirs mémorables de tournois amateurs, véritables évènements de l’été, qui attiraient foule de joueurs et public averti.
Des cours de natation sur la dune
Une piscine hors sol est aussi installée sur les hauteurs de la plage pour apprendre à nager aux jeunes générations. Certains évoquent avec le sourire les cuissardes dont René Stervinou s’équipait parfois pour l’occasion. Ses différents successeurs auront également recours à cet équipement.
Un nouveau tournant pour le club Mickey de l’Ile-Tudy dans les années 70
Yves Le Calvez devient propriétaire du club
Au début des années 1970, René Stervinou vend le club et son mobilier, dont les fameux portique et tourniquet, à Yves Le Calvez, lui aussi Professeur d’EPS.
« Yves connaissait également Jacky Trebern, le propriétaire du club Mickey de Loctudy », me raconte Jacques Godin. « Il lui a racheté les tyroliennes, cinq pédalos et la piscine pour compléter son matériel ».
L’arrivée d’un nouvel animateur, future figure du club Mickey de l’Ile-Tudy
Jacques est alors étudiant en éducation physique en région parisienne. L’été, il passe ses vacances à Pont l’Abbé, chez ses grands-parents. En 1976, par l’entremise de son cousin, il a l’opportunité de travailler en tant qu’animateur au club Mickey de l’Ile-Tudy. Ce sera le début d’une série de belles années.
Les activités du club sur la plage © Jacques Godin « Je m’entendais très bien avec Yves » poursuit Jacques. « Il fonctionnait de façon très traditionnelle. Le matin on dispensait des cours de gym – éducation physique. Parallèlement Yves donnait des cours de natation dans la piscine. Tu te souviens, il utilisait des balancelles dans la piscine », plaisante-t-il.
En effet, je me rappelle parfaitement mes premières brasses, sous l’œil attentif de Yves le Calvez, maintenue à la surface de l’eau par ces drôles de balançoires suspendues au-dessus du bassin. Je sens aussi encore cette odeur si particulière de la piscine alliant chlore, plastique exposé au soleil et sable chaud.
A l’Hôtel les Dunes nous connaissions bien l’équipe du club. Pendant les deux mois d’été, mon frère ou moi allions livrer un repas chaud, le midi, à la famille Le Calvez et aux animateurs. Poulet à la crème et frites, gratin de lasagnes, … l’équipe bénéficiait du même plat du jour que les pensionnaires du restaurant. Plus tard ce fonctionnement sera abandonné au profit de visites quasi-quotidiennes de l’équipe du club à la boutique des Dunes. Côté gourmandise, les amandines et les pommés faisaient un tabac auprès des animateurs !
Les années 80 ou l’apogée du club Mickey
Dans mes jeunes années, l’été s’annonçait vraiment à l’Ile-Tudy lorsque débutaient les travaux d’installation du club Mickey. Jacques me confirme qu“il fallait une semaine pour monter les équipements. La dune devait d’abord être « préparée » avant l’arrivée du matériel.
« On creusait des trous à hauteur d’hommes pour fixer correctement les structures » évoque Jacques. « Ensuite tous les éléments du mobilier, qui étaient stockés dans une ferme à Pen Diry, arrivaient en camion ».
Une évolution des activités à la suite du rachat du club par Jacques Godin
En 1981 Jacques Godin rachète le Club à Yves Le Calvez.
« A la reprise du Club je n’ai pas eu envie de balayer tout l’existant, j’ai simplement apporté de la modernité » explique-t-il.
Le club garde ainsi son identité et le charme de son mobilier en bois tout comme les courses en sac et le tir à la corde. La disposition des structures est modifiée, de nouveaux trampolines font leur apparition, du matériel du club Mickey de la Baule, propriété de membres de la famille du navigateur Marc Pajot, est même acquis.
La remise des lots des concours sur le trampoline, instaurée par Yves le Calvez, reste également parmi les rituels.
Jacques élargit les activités du club. Elles s’enrichissent de cours de planche à voile, d’un programme de bébés nageurs, de cours de natation pour les enfants atteints de handicap et de cours de natation en mer.
Un équipe d’animateurs qui se renforce
Par conséquent l’équipe s’étoffe. Philippe, le frère de Jacques, alors étudiant, le rejoint à l’Ile-Tudy. Puis ce sera au tour de celle qui partage la vie de Philippe, Isabelle, de rallier le club. Ainsi au fil des années des étudiants intègrent l’équipe pour la saison d’été. « Nous étions une équipe jeune, on sortait beaucoup. Même quand on était rentré tôt le matin, il fallait être debout à neuf heures pour monter le club qui ouvrait à dix heures. On assumait et on faisait les choses sérieusement. Nous étions heureux de faire ce que nous faisions, et les enfants nous le rendaient bien » commente Jacques. Il faut imaginer que le club a compté jusqu’à cent cinquante enfants à la journée. C’était le cas par exemple sur les journées concours, qui menaient les « troupes » jusqu’à Sainte-Marine, rythmées par des sessions de jeux tout au long trajet. « Certains amis donnaient des coups de main gracieusement, il y avait beaucoup d’entraide et de solidarité autour de nous », précise Jacques.
Le journal de Mickey et ses partenaires récompensent les gagnants des concours
« Le camion du journal de Mickey passait une fois en juillet et une fois en août » m’explique Jacques. « Les partenaires du journal comme Nestlé, Sevylor et autres, offraient des goodies et des articles publicitaires qui étaient distribués à l’occasion des concours ». Un des plus beaux prix fut, d’après ses souvenirs, un grand bateau gonflable Sevylor remis au gagnant du concours de déguisement. S’il est, en effet, un concours qui a davantage marqué enfants comme parents c’est celui des déguisements. Costume d’Adam pour le plus simple, pirate, squaw, dalmatien, sirène, … petits et grands ne manquaient pas d’imagination ! Claire se souvient par exemple que toute sa famille avait contribué à la confection de sa perruque de Cléopâtre avec des pelotes de laine noire sur un bonnet marin breton.
L’esprit Club Mickey de l’Ile-Tudy
« Il y avait une grande liberté au club. Les enfants allaient et venaient, l’espace n’était pas clôturé. Le club Mickey fonctionnait beaucoup sur la base de la confiance avec les parents, on ne pourrait plus travailler comme ça aujourd’hui » me confie Jacques. Il relate d’ailleurs peu d’incidents, « juste une clavicule cassée et deux enfants qui ont disparu un après-midi. Quand on les a retrouvés, ils étaient déjà presque arrivés à Sainte Marine, ils avaient, par réflexe, marché dos au soleil ».
Des années qui laissent des souvenirs inoubliables
L’équipe encourage les parents à participer à la vie du club. Cela permet alors de lier des amitiés avec les familles. « Ce sont des souvenirs inoubliables. Cela m’a permis de rencontrer des gens formidables » souligne Jacques « J’ai des relations presque fraternelles avec certains, et beaucoup d’affection pour d’autres ». Revendu au début des années 90 à Gilles Krawczyk, le club Mickey ne survivra que quelques années. Il disparaîtra laissant la dune orpheline de son mat, des sauts sur les trampolines, des descentes en tyroliennes, et de l’ambiance joyeuse des jeux et concours de l’été…
Aujourd’hui peintre, graveur et créateur de vitraux, Jacques Godin a lui troqué les étés sur la dune de l’Ile-Tudy contre l’espace plus intimiste de son atelier d’artiste à Lesconil. Ses vernissages et expositions sont toujours l’occasion de retrouvailles avec des anciens du club Mickey, qu’ils aient été à l’époque parents, enfants ou animateurs. C’est lors du vernissage de l’exposition “le Silence des Iceberg à la Galerie en Ré (Bois-Colombes) en mars 2020, qu’a germé l’idée de cet article de blog. Quelques jours plus tard nous étions confinés, restreints dans nos libertés. Plonger dans les mémoires fut l’occasion de m’évader vers l’atmosphère légère des étés à l’Ile-Tudy.